Compétence pour préempter – entrée en vigueur d’une délégation de compétence

(CAA Douai, 16 juin 2020, EPF de Normandie, req. n° 19DA00279)

La question de l’autorité compétente pour préempter est complexe. Il est rare, en pratique, que les conseils municipaux continuent à exercer ce droit, tant les délégations de compétence sont nombreuses.

La jurisprudence donne plusieurs exemples de délégations de compétence irrégulière du fait d’une publicité insuffisante.

Il en va ainsi en cas d’absence de publicité : « Il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision du 29 juillet 2016 portant délégation du droit de préemption du président de la métropole de Rouen Normandie à l’établissement public foncier de Normandie aurait fait l’objet d’une publication ou d’un affichage. Par suite le caractère exécutoire de la délégation n’étant pas établi, l’établissement public n’était pas compétent pour exercer le droit de préemption urbain dont la métropole de Rouen Normandie était titulaire ».

 

(CAA Marseille, 23 décembre 2020, OPH Var Habitat, req. n° 18MA05028).

Il en va aussi ainsi en cas de publication insuffisante sur une rubrique inadéquate d’un site préfectoral : « Le préfet du Var a délégué l’exercice du droit de préemption à l’OPH Var Habitat pour l’opération en litige par un arrêté du 22 avril 2015. Cet arrêté a été mis en ligne sur une page du site internet de la préfecture qui n’est pas dédiée à la publication des actes administratifs de l’Etat dans le département, mais qui figure à la sous-rubrique « Solidarité, femmes, handicap et cohésion sociale » de la rubrique « Politiques publiques ». En l’absence d’une information adéquate du public concernant la mise en ligne de cette décision administrative dans cette sous-rubrique, cette démarche ne permet pas de regarder celle-ci comme ayant été aisément consultable par les personnes intéressées, quand bien même la rubrique dédiée à la publication des actes administratifs de l’Etat aurait été rendue inaccessible du 4 avril au 18 mai 2015 du fait d’une attaque informatique. L’absence de formalités adéquates de publicité fait obstacle ce que l’arrêté du 22 avril 2015 soit regardé comme étant entré en vigueur le lendemain de sa mise en ligne ».

A noter que le même arrêt, pour apprécier, non la régularité d’une délégation de compétence, mais la recevabilité d’un recours, estime que « l’affichage de la délibération du 16 juin 2015 du conseil d’administration de l’office approuvant l’acquisition de la parcelle en question devant les locaux de l’office ne constitue pas une mesure de publicité suffisante à l’égard des tiers pour constituer le point de départ du délai de recours contentieux ».

Benoît JORION

Avocat à la Cour d’appel de Paris

Spécialiste en droit public