La vente de plusieurs lots de copropriété permet de mettre en œuvre le droit de préemption urbain simple

Préemption-le droit de préemption urbain

(CAA Marseille, 11 mars 2019, EPF Provence Alpes Côte d’Azur, req. n° 17MA03001).

 On sait que le droit de préemption urbain n’est applicable que si une commune décide de l’instituer sur tout ou partie de son territoire. De même, ce droit est dit simple, sauf si la collectivité décide d’instituer un droit de préemption urbain dit renforcé. Lorsque seul le droit de préemption urbain simple est institué, ce droit n’est pas applicable « à l’aliénation d’un ou plusieurs lots constitués par un seul local à usage d’habitation (…) compris dans un bâtiment effectivement soumis, à la date d’aliénation, au régime de la copropriété ».

Une unique déclaration d’intention d’aliéner portant sur 24 appartements formant 64 lots a été envoyée. L’arrêt ne dit pas si ces lots constituaient la totalité du bâtiment. Le tribunal administratif a annulé la décision de préemption, ce qui a été censuré, la cour d’appel lui reprochant d’avoir « considéré à tort que le régime de la copropriété est par nature exclusif du droit de préemption urbain. L’exercice du droit de préemption lorsqu’il concerne plusieurs locaux d’une même copropriété n’est pas soumis à l’existence d’une délibération motivée prise préalablement par la commune ».

Comme le dit l’arrêt d’appel, « par la décision attaquée, l’établissement public foncier a manifesté son intention d’acquérir cet ensemble et non de préempter un ou plusieurs lots constitutifs d’un seul local, comme cela est prohibé par l’article L. 211-4 du code de l’urbanisme. Il en résulte que l’établissement public foncier n’était pas dans l’obligation de mettre en oeuvre un droit de préemption dit renforcé et que la circonstance selon laquelle lesdits biens ne sont pas inclus dans le périmètre de ce droit demeure sans effet sur la légalité de la décision attaquée ». L’article L. 211-4 précité n’interdit de préempter qu’à l’occasion de la cession de « un seul local à usage d’habitation ». La Cour en a implicitement déduit que la préemption est possible en cas de cession de plusieurs lots, puisqu’il s’agissait d’acquérir l’ensemble. Il est permis de ne pas être convaincu par un tel raisonnement qui fait varier la possibilité de préempter en fonction de la rédaction de la déclaration d’intention d’aliéner, selon qu’elle mentionne ou non les différents lots, et qui, surtout, permet d’échapper au droit de préemption simple en présentant autant de déclaration d’intention d’aliéner qu’il y a de lots cédés.

 

Benoît JORION

Avocat à la Cour d’appel de Paris

Spécialiste en droit public

Benoit Jorion