Indication du nom de l’acquéreur dans la déclaration d’intention d’aliéner : Pas de conséquence sur le droit à rétrocession

(CE, 28 septembre 2020, commune de Montagny-les-Beaune, req. n° 432063, mentionné aux tables).

 

On sait que, alors même que le formulaire CERFA des déclarations d’intention d’aliéner fait figurer une rubrique relative à l’acquéreur, rien n’impose de renseigner le nom de ce dernier.

En cas de contentieux, la qualité d’acquéreur évincé peut être prouvée par d’autres moyens. La sécurité juridique en souffre cependant, le titulaire du droit de préemption, faute de pouvoir notifier une décision à un acquéreur qu’il ne connaît pas, étant exposé à un recours plus tardif de sa part.

Le code de l’urbanisme prévoyait cependant une sanction indirecte en cas d’absence d’indication de l’acquéreur. L’article L. 213-11-1, consacré au droit de rétrocession d’un bien illégalement préempté, prévoit en effet que : « Dans le cas où les anciens propriétaires ou leurs ayants cause universels ou à titre universel ont renoncé expressément ou tacitement à l’acquisition dans les conditions mentionnées aux trois premiers alinéas du présent article, le titulaire du droit de préemption propose également l’acquisition à la personne qui avait l’intention d’acquérir le bien, lorsque son nom était inscrit dans la déclaration mentionnée à l’article L. 213-2. »

Il était possible de se demander si conditionner le droit à rétrocession au bénéfice de l’acquéreur à la mention de son nom dans la déclaration d’intention d’aliéner, mention qui ne dépend que de sa rédaction par le notaire du vendeur, était conforme au principe d’égalité. Mais le Conseil d’Etat n’a pas eu à interroger le Conseil constitutionnel. Il s’est contenté d’admettre une interprétation neutralisante de ces dispositions : « La cour administrative d’appel de Lyon a jugé que la circonstance que le nom de M. C…, bénéficiaire d’une promesse de vente portant sur le bien en litige, n’avait pas été mentionné dans la déclaration d’aliéner ne faisait pas obstacle à ce que la juridiction compétente, saisie de conclusions en ce sens sur le fondement de l’article L. 911-4 du code de justice administrative, enjoigne à la commune de Montagny-lès-Beaune, à la suite de l’annulation de la décision de préempter ce bien et de la renonciation de l’ancien propriétaire, de proposer à M. C…, acquéreur évincé, d’en faire l’acquisition. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 qu’en statuant ainsi, la cour n’a pas commis d’erreur de droit. » L’absence de mention du nom de l’acquéreur est donc désormais sans conséquence sur son droit à rétrocession.

Benoît JORION

Avocat à la Cour d’appel de Paris

Spécialiste en droit public