Droit de délaissement ; le transfert de propriété peut être automatique

L’article L. 241-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique permet au propriétaire des biens contenus dans une déclaration d’utilité publique de mettre en demeure l’expropriant de procéder à l’acquisition de son bien, devançant ainsi le bon vouloir de l’expropriant à y procéder et tirant les conséquences de la difficulté de vendre un bien concerné par une telle procédure. L’article L. 241-2 du même code précise que, à défaut d’accord amiable, le juge de l’expropriation prononce le transfert de propriété et fixe le prix du terrain.

Saisie par une commune contestant le transfert de propriété intervenu, la Cour de cassation affirme que le juge de l’expropriation ne dispose d’aucune marge de manœuvre quant au transfert de propriété, quand bien même la demande d’un tel transfert n’aurait pas été expressément requise par le mémoire de saisine de la juridiction : « 8. Il en résulte que, lorsqu’il est saisi en application de ces textes par le propriétaire qui, ayant exercé son droit de délaissement, a nécessairement requis l’acquisition de ses biens, le juge doit prononcer, au besoin d’office, le transfert de propriété des biens délaissés. 9. Le juge de l’expropriation, devant qui la commune de [Localité 5] n’avait pas indiqué avoir renoncé au projet déclaré d’utilité publique, a exactement énoncé qu’il ne disposait d’aucune marge d’appréciation quant au transfert de propriété induit par sa saisine et en a déduit, à bon droit, sans être tenu de répondre à des conclusions inopérantes selon lesquelles le transfert de propriété n’avait pas été expressément requis par le mémoire ayant saisi la juridiction en fixation du prix des biens délaissés, que l’absence de prononcé de ce transfert résultait d’une simple omission matérielle qu’il pouvait rectifier, sans modifier les droits et obligations des parties tels qu’ils avaient été fixés par sa précédente décision. » (Civ. 3eme, 11 janvier 2023, pourv. n° 21-24.275).

Benoît Jorion

Avocat à la Cour d’appel de Paris

Spécialiste en droit public