Exemples de cas ou l’utilité publique d’une expropriation a été jugée insuffisante
Un projet de parc de stationnement public et d’arrêt de bus, dont le dossier était insuffisamment précis : « 4. Au cas particulier, il ressort des pièces versées au dossier que la commune de Saint-Julien-en-Champsaur a engagé la procédure d’expropriation de la parcelle cadastrée section C n° 149 appartenant à M. A… B… pour permettre la réalisation, dans le hameau des Combettes, d’un parc de stationnement public, comprenant un espace dédié au car de ramassage scolaire, en raison de sa proximité avec la route départementale (RD) 43 et de son » positionnement sécuritaire « . Le but étant plus précisément, d’après les motifs de la délibération du conseil municipal de Saint-Julien-en-Champsaur du 25 septembre 2018 par laquelle la commune intimée a sollicité l’engagement de la procédure d’expropriation litigieuse, de disposer d’un espace dédié à ce car de ramassage scolaire, à l’écart de cette route, pour assurer la protection des enfants déposés mais aussi sécuriser le carrefour au droit de cette parcelle, en dégageant la vue sur ladite route et, enfin, d’éviter un stationnement anarchique en période d’affluence, à l’occasion des vacances ou lors d’importantes chutes de neige. Toutefois, aucune pièce versée aux débats ne permet de déterminer les besoins en stationnement dans ce hameau dont il apparaît au vu des documents cartographiques et photographiques joints au dossier qu’il n’est composé que de quelques habitations présentant des volumes importants avec des possibilités de garer des véhicules dans les cours des différents corps de fermes et que, situé au Nord-Est du territoire communal, il est isolé du centre-ville de la commune de Saint-Julien-en-Champsaur. En l’absence, là encore de pièces probantes et de toute indication utile, en particulier sur la fréquentation de la RD 43, notamment en période hivernale, ces mêmes documents ne permettent pas davantage d’établir l’existence de difficultés de circulation dans le hameau des Combettes, ni une dangerosité particulière du carrefour au droit de la parcelle cadastrée section C n° 149. Enfin, et alors que M. B… soutient qu’aucun enfant ne réside dans le hameau des Combettes et qu’il produit, au soutien de cette allégation, deux procès-verbaux respectivement dressés les 21 juin 2021, et les 6, 9 et 10 janvier 2023, dans lesquels les huissiers de justice commis tout en constatant que le car de ramassage scolaire ne s’arrête pas aux Combettes, observent qu’à la demande de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), un second arrêt de bus a été implanté dans le hameau voisin de Chantaussel, sans précision apportée par les intimés sur le nombre d’enfants du hameau des Combettes susceptibles d’utiliser le car de ramassage scolaire, la nécessité d’y bâtir un abri bus n’est pas démontrée. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier qu’un abri en bois a déjà été bâti sur la parcelle cadastrée section n° C n° 151, située en face de la parcelle litigieuse et qui appartient à la commune de Saint-Julien-en-Champsaur. Dans la carte figurant à l’annexe 3 du dossier d’enquête préalable comme dans celle figurant à la page 12 du rapport de présentation du plan local d’urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Julien-en-Champsaur, tel que résultant de sa dernière modification adoptée par une délibération du conseil municipal du 9 novembre 2017 et disponible tant au juge qu’aux parties sur le site Internet Géoportail de l’urbanisme, cet abri est identifié comme un » abri bus « . Par suite, en l’état des pièces du dossier, et nonobstant la circonstance que la parcelle cadastrée section C n° 149 soit grevée, dans ce même document d’urbanisme, d’un emplacement réservé n° 11 pour la » création de stationnement aux Combettes « , le projet envisagé ne peut être regardé comme répondant à une finalité d’intérêt général. » (CAA Marseille, 19 septembre 2023, Préfet des hautes Alpes, req. n° 22MA01592).
La régularisation de l’emprise foncière d’un chemin : « 4. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que les voisins de Mme B… bénéficient juridiquement d’un accès à la voirie communale, l’enclavement matériel des familles E… et A… ne résultant que de la construction d’une piscine et d’un bâtiment par les époux F… empiétant sur la parcelle 686 assiette du chemin d’accès, après les ventes réalisées en 1999 et 2000. Par ailleurs, si le chemin communal desservant la parcelle A 686 est étroit et pentu, les réserves de l’agence technique départementale de l’Aude quant à la réalisation d’un accès alternatif par ce chemin qui résultent d’une étude au demeurant postérieure à l’acte contesté, ne suffisent pas, à elles-seules, à établir que son aménagement se heurterait à des obstacles insurmontables du fait de ses caractéristiques en matière de déclivité ou de largeur. Dans ces conditions, l’opération, dont l’unique objet est de désenclaver les propriétés du hameau alors que celles-ci ne sont juridiquement pas enclavées, ne peut être regardée comme présentant un caractère d’utilité publique. » (CAA Toulouse, 28 mars 2023, commune de Plavilla, req. n° 21TL00573).
Benoît Jorion
Avocat à la Cour d’appel de Paris
Spécialiste en droit public