Interprétation de la déclaration d’intention d’aliéner et impossibilité de préemption partielle
Il a été jugé (Cass. 3e civ., 17 févr. 1999, n° 97-14.225, M. Skowronski c/ Cts Gallien : Bull. civ. III, n° 44, p. 30) que les annexes à la déclaration d’intention d’aliéner avaient la même valeur que la déclaration elle-même.
Un arrêt en déduit que, alors même que la déclaration ne visait qu’une parcelle, une annexe visant aussi des lots de copropriété, alors la déclaration portaient sur l’ensemble : « 9. Il ressort des pièces du dossier que Mme B et Mme D, propriétaire l’une en usufruit, l’autre en nue-propriété des lots de copropriété n° 2, 6 et 8 de la maison d’habitation située sur la parcelle AP n°391 au lieu-dit 626 route de la Turbie et du terrain non bâti situé sur la parcelle cadastrée AP n°163 au lieu-dit Serre de la Croux, contiguë à la première parcelle, ont conclu un unique compromis de vente portant sur ces deux biens immobiliers le 13 mars 2020 avec la SCI Mas-Cozy. Si le formulaire CERFA de la déclaration d’intention d’aliéner déposée en mairie d’Èze le 5 juin 2020 par le notaire mandataire des venderesses ne mentionnait que la parcelle cadastrée AP n°163, l’annexe à laquelle renvoyait ce formulaire mentionnait expressément que la vente de ce bien était indivisible de la vente des lots de copropriété n° 2, 6 et 8 de la maison d’habitation située sur la parcelle contiguë cadastrée AP n°391. Dans ces conditions, la déclaration d’intention d’aliéner doit être regardée comme portant sur l’ensemble de l’unité foncière constituée par les lots de copropriété n° 2, 6 et 8 de la maison d’habitation située sur la parcelle cadastrée AP n°391 et du terrain non bâti situé sur la parcelle cadastrée AP n°163. »
En conséquence, le titulaire du droit de préemption ne pouvait pas préempter qu’une partie du bien, ce qui entraine l’annulation de l’intégralité de la décision de préemption : « 10. Il est constant que les parcelles cadastrées AP n° 391 et AP n°163 sont toutes deux situées en zone Ugb3 du plan local d’urbanisme de la commune d’Èze soumise au droit de préemption urbain par la délibération n° 18.15 du 21 juin 2013 du conseil métropolitain Nice-Côte d’Azur. Dès lors, la commune ne saurait utilement se prévaloir des dispositions précitées de l’article L. 213-2-1 du code de l’urbanisme qui n’autorisent l’exercice du droit de préemption sur une fraction seulement d’une unité foncière que dans le cas où les autres éléments de l’unité foncière sont situés dans une zone où le droit de préemption ne peut pas s’exercer. 11. Dans ces conditions, l’arrêté du 3 août 2020 par lequel le maire d’Èze a décidé d’exercer le droit de préemption urbain sur la seule parcelle cadastrée AP n°163, qui ne porte que sur une fraction de l’unité foncière mentionnée dans la déclaration d’intention d’aliéner, est illégal pour ce motif, sans qu’ait d’incidence à cet égard la circonstance que par une délibération du 24 septembre 2020, la commune ait décidé d’acquérir les lots 2, 6 et 8 de la maison en copropriété édifiée sur la parcelle cadastrée AP n°391. » (CAA Marseille, 12 avril 2023, commune d’Eze, req. n° 21MA04301).
Benoît Jorion
Avocat à la Cour d’appel de Paris
Spécialiste en droit public