Impossibilité de préempter un bien grevé d’un bail à construction : confirmation, au fond
Le Conseil d’Etat a précédemment jugé en référé qu’un bien grevé d’un bail à construction, ne pouvait, à l’occasion de la levée d’option par le preneur, faire l’objet d’une décision de préemption (CE, 19 avril 2022, commune de Mandelieu La Napoule, req. n° 442150, mentionné aux tables).
Saisie cette fois ci au fond, la juridiction administrative confirme l’illégalité de la décision de préemption : « 5. Il ressort des pièces du dossier, d’une part, que les baux à construction conclus les 11 et 24 mars 1988 par les sociétés intimées avec Mmes B sur les parcelles préemptées, stipulaient au bénéfice des premières une promesse de vente de ces terrains, dont elles pouvaient demander la mise en œuvre entre le 15 mars 2018 et le 14 mars 2020 et dont les termes n’ont pas été modifiés par l’avenant conclu le 22 novembre 2019, et d’autre part, que ces sociétés ont levé cette option les 3 janvier et 18 septembre 2019. Il est en outre constant que c’est à l’occasion de cette levée d’option, et après accord des parties sur le prix de cession des terrains en cause, qu’ont été établies les trois déclarations d’intention d’aliéner relatives aux trois parcelles, au vu desquelles le maire de Mandelieu-la-Napoule a décidé d’exercer le droit de préemption urbain. Il suit de là que, par l’effet de la décision en litige, ainsi qu’il a été dit au point 4, la commune s’est vue transférer la qualité de bailleur des parcelles en cause ainsi que l’obligation, stipulée dans les baux à construction au bénéfice des sociétés, de tenir la promesse de leur vendre ces mêmes terrains, laquelle n’avait pas épuisé tous ses effets avant l’édiction de la mesure litigieuse, contrairement à ce que soutient l’appelante. Cette dernière obligation a ainsi fait obstacle à ce que la décision de préempter ces parcelles satisfasse à la nécessité, résultant de l’article L. 210-1 du code de l’urbanisme, d’être prise en vue de la constitution d’une réserve foncière pour la réalisation d’une action ou d’une opération d’aménagement » (CAA Marseille, 7 novembre 2023, commune de Mandelieu la Napoule, req. n° 22MA02763).
Benoît Jorion
Avocat à la Cour d’appel de Paris
Spécialiste en droit public